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Photo du rédacteurMarine Cassoret, PhD

La technologie au secours du bien-être (XVe congrès de l'ISES, suite)

Dernière mise à jour : 24 août 2019

La troisième et dernière journée du Congrès nous permet toujours de enfin sortir à l'air libre et de voir en quoi la science peut contribuer à améliorer les techniques d'entrainement et le bien-être du cheval. Cette année, l'accent était mis sur des applications accessibles aux cavaliers plutôt qu'à des chercheurs et le programme n'a pas déçu.


En fait, j'ai quitté la troisième journée avec l'impression que ces nouvelles technologies, qu'on pourrait croire plus au service du cavalier, avaient surtout un potentiel incroyable pour améliorer le bien-être du cheval en enterrant une bonne fois pour toutes certaines pratiques qui continuent à être tolérées à grand coups de discussions stériles, d'opinions bien ancrées, et d'une grosse dose de dissonance cognitive. L'ironie est que le même jour, une cavalière de dressage se soit faite éliminer pour cause de sang sur sa monture. C'est justement en lisant les commentaires sur les réseaux sociaux, autant de ceux soutenant la décision de la fédération, que de ceux affirmant "qu'un peu de sang sont des choses qui arrivent", qu'on se rend compte que des moyens facilement accessibles par les cavaliers permettant une vision objective des choses ont un gros potentiel ...


Il était logique de débuter la journée avec Shawna Karrasch (Terra Nova Training Center) et une démonstration de dressage au clicker. Shawna collabore depuis plusieurs années avec le programme de sciences équines de l'Université de Guelph, et pour cette journée s'était associée avec la police montée de Toronto pour montrer, avec un des chevaux de la police, la simplicité avec laquelle il était possible d'intégrer le renforcement positif dans l'entrainement du cheval.


clicker renforcement positif cheval
Démonstration de clicker training par Shawna Karrasch avec les chevaux de la police de Toronto

Note 1: Quand on parle de clicker-training, on parle d'utilisation de renforcement positif allié à un renforçateur conditionné (secondaire) qui permet de pointer immédiatement du doigt la bonne réponse (voir jargon ci-dessous).

Note 2: Si vous continuez à soutenir que "le renforcement au clicker, ça fait juste des chevaux qui fouillent dans les poches", je vous recommande une petite formation en principes d'apprentissage pour réaliser enfin que le cheval fouille dans les poches si on renforce l'acte de fouiller dans les poches. En gros, votre timing et coordination sont mauvais, et c'est pas la faute de la nourriture et encore moins celle du cheval.


La police de Toronto était en soit une belle démonstration que de nouvelles techniques pouvaient être incorporées dans le dressage du cheval. Si vous pensez que la théorie de l'apprentissage c'est pas pour vous, je connais une policière qui pourrait vous convaincre que justement, c'est pour tout le monde et même pour des chevaux qui ont un vrai travail difficile. La police collabore avec les programmes de sciences équines de Guelph pour mieux entrainer leur chevaux, et la présentation faisait également une belle transition vers la session suivante sur le saddle-fitting avec Jochen Schleese, en mentionnant que les selles avaient récemment été remplacées par des modèles sur mesure pour leurs chevaux permettant la légèreté d'utilisation avec le besoin de rester en selle dans des situations difficiles. Pour ceux intéressés par le modèle utilisé, la saddle-fitter (August Equine) était sur place et j'ai trouvé le modèle de selle particulièrement intéressant.


Mais c'est surtout sur les nouvelles technologies embarquées que je voudrais me concentrer, et montrer à quel point elles peuvent contribuer à améliorer la condition du cheval monté. Ne commencez pas à vous dire "mais c'est des gadgets et c'est juste fait pour faire des sous". Si c'est juste pour pouvoir trouver une excuse à persister à monter avec un cheval enroulé en tirant sur les rênes, tant pis pour vous. Les gadgets c'est pas mon truc. Les données objectives pour soutenir un argument, oui.




On débute par un licou/licol intelligent, né d'une histoire d'amour entre un ingénieur et son cheval qui a malheureusement fini en drame: Le cheval ayant démarré une colique dans la nuit lorsque personne n'était dans l'écurie, et décéda dans la nuit. De cette expérience est né le licol NIGHTWATCH. Le licou en cuir de type quick-release est équipé d'un détecteur lié à une application pour téléphone permettant d'enregistrer les paramètres du cheval et de détecter tout mouvement anormal lorsque le cheval le porte - qu'il s'agisse d'un départ de colique, d'une jument prête à mettre bas, d'un cheval qui se coince dans le box ou se met à paniquer. La magie de cet équipement? Le licou se calibre au cheval, donc permet d'être utilisé par exemple sur des chevaux ayant des tics et de distinguer des mouvements "normaux'" pour le cheval, et d'autre indicatifs d'un problème. Lorsque le licou détecte une anomalie, une alerte est envoyée par téléphone, texto et courriel. L'application permet aussi de vérifier le cheval en tout temps, le système envoyant des données sur ses paramètres vitaux et ses mouvements.


Mais ce sont surtout les démonstrations suivantes qui offraient une lueur d'espoir pour rendre enfin accessible des aides technologiques pouvant facilement modifier la performance du cavalier:



Les détecteurs envoient l'information sur un cellulaire et permettent au cavalier de se corriger automatiquement

Tout d'abord, la nouvelle génération de tensiomètre par IPOS, sur le marché depuis quelques années, et qui permet en temps réel de mesurer la tension exercée sur les rênes par le cavalier. Les données sont envoyées à une application pour telephone, et peuvent être accessibles immédiatement par un coach au sol. Ou vous pouvez garder votre cellulaire sur vous et avoir une alerte si vous dépassez un certain seuil de tension ou si vous êtes asymétrique.


Cette technologie est particulièrement importante et pour plusieurs raisons:

  1. TOUS les cavaliers sont asymétriques, et tirent plus sur une rêne que sur l'autre

  2. Des tensions excessives sont UN DES PLUS GROS PROBLÈMES en équitation, car le seuil de douleur est probablement beaucoup , BEAUCOUP plus bas (de l'ordre de quelques centaines de grammes) que ce qui est souvent observé (plusieurs kilos. Oui vous avez bien lu, et ici on ne parle même pas de l'effet amplificateur d'une muserolle serrée)

  3. Les coach, juges, etc. sont INCAPABLES d'évaluer objectivement la tension dans les rênes lorsqu'ils observent un cavalier.


Note: D'autres fabricants ont des modèles similaires, qui se démarquent par des lumières LED sur la têtière du cheval informant le cavalier de la tension exercée et permettant de relâcher immédiatement. Par exemple: https://www.telerein.co.nz/

Personnellement je préfère l'idée d'avoir un indicateur visuel plutôt que sonore, qui implique de garder le cellulaire sur soi, avec des écouteurs.


COREX EQUINE est une application permettant de corriger immédiatement la position du cavalier, sans dépendre de l'avis d'un coach au sol ou de l'installation de miroirs sur les murs du manège.


Il y a quelques années était déjà sorti COREX EQUINE, qui permettait au cavalier de corriger en temps réel sa position en selle sans avoir besoin d'un manège équipé de miroirs. J'avais ADORÉ ce programme, et constaté à quel point il devenait facile de s'auto corriger sans passer par l'avis d'une personne au sol. Ce programme était déjà le fruit d'une collaboration entre des ingénieurs et Hilary Clayton, qui s'en était notamment servi pour se remettre en selle après une chirurgie. Cette année, Dre Clayton remettait ça avec une nouvelle application iPhone/Android permettant au cavalier de corriger... l'angle du chanfrein.



Le detecteur sur la têtière indique au cavalier l'angle du chanfrein par rapport à la verticale

Ouaip. Fini les discussions de "il est en avant de la verticale" / "non c'est pas vrai" /"oui c'est vrai" etc. Parce que (1) la majorité des cavaliers est incapable, en selle, de voir si le cheval est en arrière de la verticale ou non et (2) à en voir les clinics tenus par des grands du dressage, il semble que même avec un manège de plusieurs millions et des miroirs partout ça reste difficile. Ou le reflet de la psychologie humaine.


La démonstration a parlé d'elle-même. Non seulement parce que le système est facile à calibrer et à utiliser. Les lumières LED sur la têtière informent immédiatement le cavalier de la position du chanfrein (en avant, sur la verticale ou en arrière de la verticale). En plus de l'angle de la tête, le système apporte également des données sur la vitesse , la direction et le tempo du cheval, ainsi que son rythme cardiaque, qui peuvent être sauvegardées afin de suivre la progression dans l'entrainement (avec de futures mises à jour qui permettront d'élargir les données prélevées).




Mais c'est le travail du cheval de démonstration qui confirmait la beauté de cette application. Le cheval était un jeune westphalien de dressage qui avait été utilisé plus tôt dans la journée. Lors de la premiere sortie montée, il était évident que celui-ci était fréquemment en arrière de la verticale, son encolure cassée au niveau C3-C4. Phénomène courant de nos jours, certes. Lors de la démonstration pour le système Equla, la cavalière, face au détecteur, a commencé à changer. À la fin de la démonstration, le cheval était en avant de la verticale, la base de son encolure était relevée, et l'allure était belle.


Oui c'était bon pour l'entrainement du cheval, mais ce n'était pas la beauté de l'application.


C'était encore mieux que ça.


La cavalière s'était corrigée toute seule. Sans discussion, sans avoir été attaquée par des membres du public ou s'être disputée avec son coach. Sans avoir eu l'impression qu'avant elle faisait mal. Le sytème ajustait tout simplement sa perception en lui délivrant immédiatement des données objectives fournies par le détecteur.


Petite lumière rouge, j'avance les mains. Lumière bleue, mon cheval a le nez en avant. Une application qui est à l'équitation ce que la balance est à la perte de poids: Le changement est constaté via des mesures qui ne passent pas par le filtre cognitif du cavalier ou de l'entraineur (ou du juge).


Des siècles de conflit entre cavaliers. Finis.

Des centaines de chevaux qui vont enfin avoir la possibilité de mieux voir devant eux.


Avouez quand même, la technologie ça a du bon.



RESSOURCES:


AUGUST EQUINE, Saddle Fitter, qui travaille avec la police de Toronto pour seller les chevaux et distribue le modèle Mounted Troops: http://augustequine.com/


Oubliez le voyage à Cuba! Vous avez envie de vous offrir un stage de renforcement positif au soleil? Vous pouvez jeter un coup d'oeil au centre de Shawna Karrasch au Nouveau Mexique: https://www.terranovatrainingcenter.com/


NIGHTWATCH, licol intelligent: https://www.smarthalter.com/learn


IPOS Technology, développeur du tensiomètre de rênes: https://www.ipostechnology.com/


COREX EQUINE, correcteur de position: https://corexequine.com/


EQULA, contrôle de la position du chanfrein: https://www.equ.la/




Pour ceux qui ne veulent toujours rien savoir de la technologie wifi, on peut aussi commencer avec un gadget en plastique, qui est facile à mettre dans la poche et n'a pas besoin d'être rechargé ou d'être connecté. Je parle bien sûr de la gauge de muserolle développée par l'ISES, qui permet objectivement de mesurer l'ajustement et s'assurer qu'on garde l'équivalent de deux doigts (adultes) entre la muserolle et le chanfrein. Comme pour les autres gadgets, la mesure est objective et ne dépend pas de l'épaisseur du doigt de la personne ou de son interprétation.


Pour commander la gauge:


Envie d'en apprendre plus?

Plusieurs formations en ligne sont disponibles, allant de conférences introduisant le concept de bien-être du cheval et de science de l'équitation aux cours approfondis de 12 semaines.



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